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M. Pélissier se retira d’abord à Sorel, puis à Saint-Jean et à Carillon, sur la frontière. En ce dernier endroit il fit pendant quelque temps le rôle d’ingénieur ; mais ne pouvant pas s’entendre avec l’ingénieur en chef, il alla se faire payer par le Congrès les avances faites à l’armée américaine, et passa en France, à Lyon, où il avait sa famille. Il envoya plus tard une procuration à un M. Perras de Québec, pour que celui-ci réglât toutes les affaires en son nom.

Quoique M. Pélissier eût emporté tout son argent et un compte des avances faites à l’armée du Congrès se montant à 2000 louis, qu’il n’eût laissé qu’environ 6000 barriques de minérai, fort peu de fer dans les différents magasins, néanmoins M. Laterrière ne se découragea point : il déploya toutes les ressources de son talent et fit appel à ses nombreux amis pour préparer la campagne qui allait suivre, Il doubla les préparatifs et remplit les magasins de provisions et de marchandises, car il était décidé à employer le plus de monde possible. Il prouva qu’il méritait la confiance de la Compagnie, car il eut le bonheur de faire une brillante et profitable campagne, que l’on citait tous les ans sous le nom de Première campagne de Laterrière. Dans le cours de l’hiver suivant il paya ses dettes, et le coffre-fort contenait des moyens suffisants pour pousser vigoureusement les travaux de l’année suivante. « J’étais si content de moi-même, dit-il avec ingénuité, voyant que tout me riait, que je donnai plusieurs bals et dîners au général Kidgzel (Kiedesel), en garnison alors aux Trois-Rivières, avec son état-major et les respectables citoyens de cet endroit et du voisinage. »

Lorsque la paix eut été conclue, M. Pélissier revint pour quelque temps à Québec, il régla ses comptes avec M. Laterrière, puis il repartit pour la France. Il était en amitié avec le gouverneur Haldimand, mais il ne pouvait demeurer au Canada après la conduite qu’il avait tenue pendant l’invasion américaine. Avant de partir, il paraît avoir demandé au gouverneur d’arrêter M. Laterrière, contre qui il avait des sujets de plainte d’une nature fort délicate.