Page:Caron - Deux voyages sur le Saint-Maurice, 1889.djvu/272

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 270 —

Banlieue des Trois-Rivières, et alors les cavaliers se donnaient le plaisir d’une chasse aristocratique. Ils couraient à la poursuite des renards, à travers les champs couverts d’une belle moisson, en traversant les fossés, en sautant les clôtures : c’était une récréation élégante et superbe. Quand les renards avaient succombé, les hardis chasseurs et leurs meutes aboyantes retournaient aux Forges : il ne restait à M. Bell que le soin d’acheter de nouveaux renards l’automne suivant. Pourtant il restait une autre chose à faire. Le lendemain un de ses employés passait dans chaque maison de la Banlieue : Combien demandez-vous pour le dommage que la chasse d’hier vous a causé ? On faisait le prix, et notre homme payait en beaux écus sonnants.

Les lords anglais peuvent à peine suivre un régime de vie comme celui de M. Bell. Ses biens n’étaient pas inaliénables comme ceux des lords, et les forges ne lui appartenaient pas ; après ces folies brillantes, il fit une banqueroute retentissante comme les scènes du Talley ho hunt club, une banqueroute de 40,000 louis. Cela n’eut pas lieu, cependant, lorsqu’il exploitait encore les forges Saint-Maurice, car alors les revenus d’une industrie prospère le tenaient plus ou moins à flot. D’ailleurs, il faut reconnaître qu’il conduisait les affaires avec habileté, et n’eût été cette manie étrange de singer les lords d’Angleterre, il eût laissé une fortune considérable.

Le bail étant expiré en 1831, fut étendu d’un an encore, et il fut régulièrement renouvelé ensuite pour 10 autres années. Pendant cette dernière période, un grand mécontentement commençait à se répandre dans la population du district des Trois-Rivières, et les plaintes se faisaient jour auprès du gouvernement avec une énergie croissante. C’est que les personnes qui louaient les Forges tenaient les fiefs de Saint-Maurice et de Saint-Étienne entièrement fermés à la colonisation, ce qui nuisait aux intérêts de la ville et du district. M. Étienne Parent se fit l’interprète de ces plaintes dans un rapport présenté au Conseil Exécutif et daté du 15 septembre 1843 ; ce rapport fut approuvé par le gouverneur, le 26 du même mois. Pour ne rien préci-