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Tout-à-coup, les portes et les fenêtres des Forges se trouvent ouvertes, et le gros marteau commence à battre boum, boum, boum, comme si l’on eût été en plein lundi. Les deux ou trois personnes restées au fourneau et les plus proches voisins coururent voir ce que c’était. Ils aperçurent un homme qui avait une jambe sous le gros marteau, et qui tournait cette jambe sur un sens et sur l’autre, pendant que le marteau battait, absolument comme on fait d’une barre de fer que l’on veut écrouir. Les flammèches s’échappaient en quantité, et la jambe s’allongeait comme si elle eût réellement été de fer rougi. Les spectateurs ne s’en tenaient plus d’épouvante. Cependant il se trouva un homme assez brave pour s’avancer et essayer de pénétrer dans les Forges, mais au moment où il arrivait dans la porte, tout se trouva fermé et barré comme auparavant. Il s’éloigna ; les portes se rouvrirent et le marteau recommença à battre.

On courut avertir le bourgeois. Il vint promptement et put tout voir de ses yeux ; il essaya de pénétrer dans les Forges, mais la porte se trouva fermée et le marteau arrêté. Il donna ordre aussitôt de faire cesser la danse. Chacun s’en retourna chez soi bien effrayé, et l’on n’entendit plus rien le reste de la nuit.

Il y eut encore un autre fait du même genre.

Les charretiers avaient pour habitude, du moins, quelques-uns d’entre eux, d’aller chercher un voyage de mine le dimanche au matin ; on disait que c’était nécessaire afin qu’il y en eût assez pour alimenter le fourneau pendant toute la journée.

Un dimanche, au soleil levant, plusieurs charretiers s’en allaient chercher des charges avec leurs voitures à quatre roues et à deux chevaux.

Arrivés au haut de la côte, ils rencontrent quelqu’un qui revenait déjà avec une charge.

Cet homme était assis sur le devant de sa voiture, mais il avait son chapeau tellement sur les yeux que personne ne pouvait lui voir le visage. Les charretiers se mirent à l’insulter :