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Page:Caron - Deux voyages sur le Saint-Maurice, 1889.djvu/297

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nous avons assez du sifflement de la bise. Notre oiseau d’hiver, c’est la mésange. Celui que les hommes ont ajouté, c’est un diablotin ou un être qui a mangé le fruit défendu.

Laissons là les moineaux, j’en suis fatigué. Je n’en ai pas vu de mon voyage, que Dieu soit béni, il m’a évidemment protégé.

Nous faisons un coude, et puis nous arrivons à l’ancien moulin d’Odgen. J’ai cherché des yeux les restes de cette scierie, et je n’en ai rien vu. Je vous dirai bientôt quel intérêt m’attache à ces ruines ; en attendant, veuillez suivre cette progression qui est assez curieuse : La première scierie, le long du Saint-Maurice, a été construite par M. Thomas Coffin, puis reconstruite par M. Isaac Gouverneur Ogden, sur un petit ruisseau. La seconde a été construite par M. Greeve sur la rivière Cachée. La troisième a été placée hardiment sur le Saint-Maurice lui-même par M. Baptist, à la chute des Grès. Je crois que la progression est arrivée à son terme, du moins quant aux scieries qui prennent l’eau pour pouvoir moteur.

Lorsque nous étions professeur au vieux collége des Trois-Rivières, les ruines du moulin d’Ogden étaient bien conservées. La grande roue était là avec ses aubes, la dalle emmenait un courant d’eau rapide et bien fourni, le carré du moulin était encore debout, mais le toit avait été enlevé et les scies n’existaient plus. Des arbustes avaient poussé tout autour du moulin, et cachaient la maison de M. Ogden qui se trouvait un peu plus loin.

Quand le ciel était serein, dans les grands congés de la belle saison, je partais du collége avec mon ami de cœur, M. l’abbé Em. Guilbert : nous traversions les ponts du St-Maurice, nous gravissions un coteau et nous nous trouvions en un endroit où le sable poudroie au moindre vent comme la neige en hiver ; nous ne manquions jamais d’écrire sur les bancs de sable de nombreuses sentences que le vent effaçait bientôt, nous avions en cela une image mélancolique et vraie de l’instabilité des œuvres de l’homme