Page:Caron - Deux voyages sur le Saint-Maurice, 1889.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 71 —

Quand nous avons passé la partie qui est en bois, nous arrivons à la terre de M. Israël Deschênes, et depuis ce moment, quelle succession de terres magnifiques ! Quelles moissons abondantes se déroulent à nos yeux ! Quel plaisir de contourner ces pointes si fertiles, ces champs si plantureux !

Ah ! ce n’est plus ici la navigation variée du Saint-Maurice ; ce n’est plus le panorama de ses montagnes ; ce ne sont plus ces décharges d’armes à feu, ces pavillons flottants, ces démonstrations de toute sorte : le silence règne partout, et nous sommes comme perdus dans les détours de cette petite rivière ; mais la beauté des champs réjouit vraiment les yeux.

Vers le milieu du chemin, nos hommes qui étaient partis à pied paraissent sur le rivage. Nous abordons. M. Prince se hâte de descendre ; il était fatigué du canot, et comme il s’était chaussé de bonnes bottes sauvages pour la circonstance, il demande à faire le reste du voyage à pied ; Nestor Desilets au contraire, ennuyé de marcher au milieu de la rosée, demande à monter en canot.

Nous changeons un peu les dispositions : je passe dans un autre canot et Nestor Desilets prend ma place dans le canot de Monseigneur, puis nous partons.

Il y a trois milles de La Tuque à l’embouchure de la rivière Croche, et il y en a quatre de cette embouchure à la demeure de M. Adolphe Larue, où nous ferons la mission ; mais ces quatre milles nous paraissent aussi longs que dix. À un moment donné, le canot où j’étais se trouvant enfoncé dans le sable, mon canotier descend dans la rivière, et pousse le canot jusqu’au chenal le plus proche.

Nous arrivons enfin, et nous montons notre canot sur la grève : un chemin se trouve tracé dans le champ et balisé jusque chez M. Adolphe Larue. Devant cette maison il y a un grand mât avec un magnifique pavillon. Nos compagnons qui venaient à pied arrivent au bout de quelques instants. M. Larue vient au devant de Monseigneur, et nous nous rendons à sa maison. Sur le seuil est un joli petit garçon, avec un