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ils se dirent : allons voir ce qu’il est devenu. Le contremaître, qui était un anglais, les avertit de prendre leur temps, car votre compagnon, dit-il, est certainement mort, et vous n’en trouverez que les débris. Ils descendirent par un ravin qui se trouvait à une certaine distance. Arrivés au pied de la montagne, ils aperçurent un homme qui semblait occupé à se préparer un chemin à travers la neige : c’était Marcotte qui gagnait le ravin pour retourner à son ouvrage. — Mais tu ne t’es donc pas fait mal — Non, répondit-il tranquillement, tout en marchant vers le ravin. Et le cheval s’avançait aussi, et paraissait n’avoir aucun mal. Or ils étaient tombés d’une montagne qui a plusieurs centaines de pieds de hauteur. Faites-vous montrer cette montagne, amis lecteurs, et vous trouverez comme nous qu’il y a dans cette protection quelque chose de merveilleux. Pour conserver le souvenir d’un fait aussi étrange, quelques personnes se sont plu à nommer l’endroit où il s’est passé le saut de Marcotte.

Nous sommes à la Rivière-aux-Rats à huit heures et dix minutes. Il nous fait plaisir de retrouver l’excellente famille Desilets, ce sont de nos amis maintenant.

Après le repos d’une bonne nuit, nous nous rendons à la chapelle. Monseigneur dit la première messe et M. Prince la seconde. Monseigneur voyant l’heure trop avancée, nous condamne, M. Gravel et moi, à ne pas dire la messe ce matin-là. J’étais contrarié, je l’avoue. Mais, sur ces entrefaites, M. Gravel arrive et dit qu’il veut faire communier M. J. B. Hennesse. Je suis donc forcé de dire la messe, car il faut consacrer une hostie pour ce vieillard. C’est une nécessité bien douce pour moi.

Nous partons à 9 heures, dans ce chaland de M. Grandmont qui nous a menés si heureusement à La Tuque. Madame Pelletier et ses deux beaux petits garçons reviennent à la Grande-Anse, Madame H. Desilets nous accompagne aussi jusqu’à la Grande-Anse. On chante, on lit, on cause. Un grand aigle se montre quelque temps, et se replonge dans la forêt.