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les femmes écrivains de la france

jours, — et ses soupçons pouvaient bien avoir quelque fondement, — que la cause de cette saisie, puis de l’ordre brutal de départ immédiat, venait de ce qu’on ne trouvait pas, dans son ouvrage, un seul mot qui rappelât Napoléon et les exploits de nos armées. En tout cas, cette poursuite d’un ouvrage, approuvé par la Censure, se fit sous la responsabilité d’un nouveau ministre, Savary, duc de Rovigo. Mme de Staël demanda un léger sursis à son départ pour faire les apprêts de son embarquement ; le duc de Rovigo ne lui fit qu’une froide réponse. Cet odieux procédé, que rien ne justifie, est rappelé, par Mme de Staël, dans la préface de la seconde édition de l’Allemagne. « Votre ouvrage n’est point français, » lui écrivit le nouveau ministre, en se vantant d’en avoir lui-même arrêté la publication, puis il ajoutait à la dureté de ses ordres cette ironie dont le goût lui parut sans doute plus français : « Il m’a paru que l’air de ce pays-ci ne vous convenait point, et nous n’en sommes pas encore réduits à chercher des modèles dans les peuples que vous admirez. »

« C’était, en effet, le trait particulier et original