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ni repos ni trêve. Partout retentissait le bruit des armes.

Je me trompe ; au milieu de tant de désordres, il y avait des asiles de paix. Chose étonnante, ils étaient respectés de gens qui violaient sans scrupule les serments les plus sacrés. C’étaient les monastères. À l’ombre du cloître, on trouvait la sécurité, inconnue ailleurs. La religion élevait des remparts au pied desquels venaient expirer la violence, la vengeance, et toutes les passions humaines.

Faut-il être surpris, si ces siècles tourmentés virent la fondation de tant d’établissements monastiques ? Là, au milieu des exercices d’une austère piété, se conservèrent au moins quelques pâles lueurs de science et de littérature, et dans le gouvernement électif du chef de la communauté un dernier vestige des libertés municipales.

Dans le grand travail de civilisation entrepris par Charlemagne, les monastères ne furent pas oubliés. Chaque abbaye formait un centre, une école, une corporation : on y voyait la preuve vivante de la puissance de l’association, et un modèle de la persévérance, sans laquelle on ne fonde rien de grand ni de durable. Les monastères, pour la plupart, furent bâtis au milieu de terrains incultes, de landes, de bruyères, de marécages, et jusqu’au sein des forêts les plus abandonnées. Arrosées des sueurs de travailleurs humbles et infatigables, ces terres, jusqu’alors stériles, ne tardèrent pas à se couvrir de riches moissons. Les rivières furent retenues entre des digues ; les étangs furent