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ses caprices, s’amuser, et rire.

Il est arrivé dans ce tems là qu’un sbirre entra dans un caffè où il y avoit deux ecoliers. Un de ceux ci lui ordonna de sortir, le sbirre le meprisa, l’écolier lui lacha un coup de pistolet, et le manqua, mais le sbirre riposta, et blessa l’ecolier, puis se sauva. Les ecoliers s’assemblèrent au Bo, et allèrent divisés en plusieurs pelotons chercher des sbirres pour venger l’affront reçu en les massacrant ; mais dans une rencontre deux ecoliers resterent morts. Tout le corps des ecoliers s’unit alors, et jurerent de ne jamais mettre bas les armes que lorsqu’il n’y auroit plus de sbirres à Padoue. Le gouvernement s’en mêla, et le sindic s’engagea de faire mettre bas les armes aux ecoliers moyennant une satisfaction, puisque les sbires avoient tort. Le sbirre qui avoit blessé l’ecolier fut pendu, et la paix fut faite ; mais dans les huit jours avant qu’on fasse cette paix tous les ecoliers allant par Padoue divisés en patrouilles je n’ai pas voulu être moins brave que les autres, et j’ai laissé que le docteur dise. Armé de pistolets, et de carabine je suis allé tous les jours avec mes compagnons chercher l’ennemi. Je fus tres mortifié que la compagnie dont j’etois membre ne rencontra jamais aucun sbirre. Le docteur à la fin de cette guerre se moqua de moi ; mais Bettine admira mon courage.

Cette demelée entre sbires, et écoliers me donna une idée de la guerre, et me rendit convaincu que si j’en avois entrer à la metier je n’aurois pas eté moins brave manqué de courage qu’un autre, mais je n’ai pas eu le tems d’app???.

Dans ce nouveau train de vie, ne voulant pas paroitre