dames etrangeres avec leurs messieurs, et un venitien tres bien
mis, et assez bel homme qui montroit trente cinq à quarante ans,
et que je n’aurois jamais reconnu si Zanovich ne me l’avoit nommé
Aloïse Zen. Zen etant une famille patricienne je me suis cru
en devoir de lui demander quelles étoient les titres que je lui devois,
et il me répondit ceux qu’on donne à un ami d’ancienne date, et
que je ne pouvois pas remettre, car il n’avoit alors que dix ans. Il
me dit qu’il étoit le fils du capitaine Zen au quel j’étois consigné que j’aurois connu
lorsque j’étois arreté aux arrets au fort S. André. Il y a de cela, lui dis-je,
vingt huit ans, et je vous remets, Monsieur, malgrè que dans
ce tems là vous n’aviez pas encore eu la petite verole. Je l’ai
vu faché de devoir en convenir, mais toute la faute fut à lui puisqu’il
n’avoit nul besoin de me dire qu’il m’avoit connu là, et
que l’adjudant etoit son pere. Il etoit fils d’un fils naturel
d’un noble venitien. Ce garçon étoit le plus grand polisson de
la fortresse ; un garnement du premier ordre. Il venoit alors
de Madrid où il avoit gagné beaucoup d’argent tenant la
banque de Pharaon dans la maison de l’ambassadeur de Venise.
Marco Zen. Je fus enchanté de le connoitre personellement. Je me suis appercu
à ce diner qu’il n’avoit ni culture ni la moindre education,
il n’avoit ni les façons ni le langage d’un homme comme
il faut ; mais il n’auroit pas voulu troquer son talent de
savoir corriger la fortune contre tout cela. Medini, et Zanovich
étoit tout autre chose. Les deux étrangers étoient les
dupes de sur les quels ils avoient jeté le devolu ; mais je ne
fus pas curieux de la partie. Lorsque j’ai vu preparer la
table pour le jeu, et un tas d’or que Zen mit hors d’une
grande bourse je me suis retiré.
Ce fut ainsi que j’ai constament vecu tous les sept mois que je suis resté à Florence. Après ce diné je n’ai plus vu ni Zanovich, ni Medini, ni Zen que par hazard dans les endroits publiques. Mais voila ce qui est arrivé à la moitié de Decembre.