Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/102

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Je n’ai pas oſé allumer ma lampe, et l’obſcurité étant prévue, il s’eſt déterminé à accepter du pain, et un verre de vin de Chypre que je n’ai pas pu m’empêcher de lui offrir également que ma paillaſſe, qui étoit devenue le lit de tous les nouveaux arrivés. Le lendemain on lui porta un lit, et du linge, et à manger de la juiverie. J’ai eu ce fardeau ſur le corps presque trois mois, car le ſecrétaire du tribunal eut beſoin avant que de l’envoyer aux quatre de lui parler pluſieurs fois pour tirer au clair ſes friponneries, et pour le forcer à défaire des contracts illicites qu’il avoit faits à ſon trop grand avantage. Il me confeſſa lui-même d’avoir acheté du N. H. Dom. Mich. des rentes qui ne pouvoient appartenir à l’acheteur qu’après la mort du Ch. Ant… ſon père : il ajouta qu’il étoit vrai que le vendeur y perdoit cent pour cent ; mais qu’il falloit conſidérer que l’acheteur auroit perdu tout, ſi le fils fût mort avant le père.

Lorsque j’ai vu que ce mauvais camarade ne s’en alloit pas je me ſuis déterminé à allumer ma lampe : il m’aſſura qu’il n’en diroit rien à perſonne, mais le bavard ne m’a tenu parole que jusqu’à ſon départ, car quoique