Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/137

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trouvoit pas. À cette réponſe que ſes gens qu’il avoit apparemment irrités applaudirent, il heurla, il donna de la tête contre la cloiſon, il peſta des pieds, j’ai cru qu’il alloit devenir furieux. Il ſortit ſuivi de ſes archers, qui me portèrent d’abord mes hardes, mes livres, mes bouteilles, mon dîner qui étoit encore là depuis le grand matin, et tout ce qui m’appartenoit excepté le morceau de pierre de touche, et ma lampe. Après cela il entra dans le corridor, et il ferma les vitres des deux fenêtres par où je recevois un peu d’air. Moyennant cela je me ſuis trouvé dans le plus ardent de l’été enfermé comme hermétiquement dans un très-petit lieu où l’air ne pouvoit entrer par aucune autre ouverture. J’avoue qu’après ſon départ je me ſuis trouvé quitte à bon marché. Malgré l’eſprit de ſon métier il n’a pas penſé à viſiter le fauteuil ; et en me trouvant encore poſſeſſeur de mon verrou j’ai pourſuivi à y compter deſſus ſans avoir cependant dans ma tête aucun projet.

La grande chaleur, et le bouleverſement de la journée m’empêchèrent de dormir. Le lendemain de bonne heure il me porta du vin qui étoit devenu vinaigre, de