Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/171

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rial, et que certainement l’impératrice non ſeulement s’empareroit de la ville, mais les récompenſeroit. Ils dirent tous au chapelain qu’ils étoient prêts ; et il s’engagea de porter le lendemain l’écriture, et de partir d’abord pour venir ici la préſenter à l’ambaſſadeur. Avant que de partir il dit que L… ſigneroit auſſi, ce qui me fit une grande peine, car ce L… étoit mon compère de S. Jean, parenté ſpirituelle qui lui donnoit ſur moi un titre inviolable, et beaucoup plus fort, que s’il eût été mon frère ; mais après avoir beaucoup combattu avec moi-même j’ai vaincu ce ſcrupule auſſi, et j’ai décidé de faire aller en fumée cet infame projet.

Après leur départ, j’ai eu tout le loiſir de m’évader, et j’ai cru inutile de m’expoſer à un nouveau risque en me cachant le lendemain ſous le même lit : j’avois aſſez découvert. Je ſuis parti avant minuit dans un bateau ; et le matin avant midi je fus ici. Je ſuis entré dans une apothicairerie, où un jeune homme me fit le plaiſir d’écrire les ſix noms de ces rebelles, et en s’agiſſant de crime d’état j’ai été chez le ſecrétaire des inquiſiteurs, auquel j’ai tout dit. Il m’a ordonné d’aller chez lui le lendemain de bonne