Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/175

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le trou ; mais ſi Laurent fût allé chez lui, tout étoit perdu, car il auroit vu le trou ouvert, et il ne l’auroit point vu dans le cachot.

Le récit que Soradaci me fit de ſon affaire m’a fait juger qu’il devoit certainement ſubir des interrogatoires ; car on ne pouvoit l’avoir enfermé que par ſoupçon de calomnie, ou par obscurité de rapport. J’ai donc décidé de lui confier deux lettres, que s’il eût porté à leurs adreſſes dans le cas qu’il fût mis en liberté n’auroient pu me faire ni bien ni mal, et qui n’auroient pu que m’être utiles ; ſi au lieu de les porter il m’eût joué un tour de ſon métier en les donnant au ſecrétaire. J’ai donc paſſé une grande partie de la journée à les écrire avec du crayon. Le lendemain Laurent me porta un crucifix de bois, une image de la ſainte vierge, et une bouteille d’eau bénite.

Après avoir bien donné à manger à Soradaci, et mieux à boire, je lui ai dit que j’avois beſoin de le prier de me rendre un grand ſervice, en comptant ſur ſa fidellité pour le ſecrêt, et ſur ſon courage, car ſi l’on vînt à ſavoir que ce fût lui qui m’eût fait ce plaiſir, il ſeroit puni. Après ces paroles, je lui ai dit qu’il s’agiſſoit de porter à