Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/22

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bons conſeils, et de l’argent ; et ce dont il ne me rendoit pas compte étoit qu’il prioit inceſſament Dieu de me faire connoître toute l’irrégularité de ma conduite.

Dans le mois de Mars de l’année 1755 j’ai pris un appartement dans la maiſon d’une veuve ſur le quai qu’on appelle à Veniſe le fondamente nove, en aſſurant M. de Br… que ce nouveau ſéjour étoit néceſſaire à ma ſanté, puisque l’été alloit venir, et dans les grandes chaleurs qu’on reſſentoit dans l’intérieur de la ville j’avois beſoin d’habiter dans un quartier expoſé au grand air, et à la fraîcheur du vent du Nord. Ce Seigneur qui trouvoit bon tout ce que je déſirois approuva mon idée, aſſez content de ce que je lui promettois d’aller dîner chez lui tous les jours. La vraie raiſon qui me faiſoit quitter ſon palais étoit celle de devenir voiſin d’une fille que j’aimois. Le détail de cette intrigue n’a rien de commun avec cette hiſtoire ; ainſi je l’épargne au lecteur.

Le 25 du mois de Juillet un quart d’heure avant le lever du Soleil, j’ai quitté l’Erbaria pour aller me coucher. Cette Erbaria eſt un endroit ſur un quai du grand canal attenant au pont de Rialte, qui s’appelle ainſi