Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/272

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mortelle : les ſeconds que le chirurgien répondoit de ſa vie : les troiſièmes que la bleſſure étoit légère ; et à la fin que ce n’étoit qu’une égratignure de la pointe d’un couteau. Le lendemain on n’en a pas ſu davantage, ni jamais, malgré un très-ſévère procès, qui couta au roi cinq millions, qui fut imprimé, et connu de tout le monde, et qui n’a rien de commun avec l’hiſtoire de ma fuite, qu’il me ſemble devoir terminer ici.

Quand il me prendra envie d’écrire l’hiſtoire de tout ce qui m’eſt arrivé en dix-huit ans, que j’ai paſſés parcourant toute l’Europe jusqu’au moment qu’il plut aux inquiſiteurs d’état de m’accorder la permiſſion de retourner libre dans ma patrie d’une façon qui me fut très-honorable, je la commencerai à cette époque, et mes lecteurs la trouveront écrite avec le même ſtyle, car il n’y a pas d’écrivain, qui en ait deux, tout comme il n’y a pas de viſage, qui ait deux phyſionomies. Mon hiſtoire, ſi je l’écris, ſera inſtructive dans pluſieurs points de morale. On apprendra que le plus ſouvent l’homme a tort de s’attribuer du mérite pour ce qu’il a fait de bon ; et double tort de calomnier la