Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/277

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alors inquiſiteur d’état, neveu de celui qui régnoit lors de ma fuite, et oncle de l’autre que j’ai trouvé à la meſſe, et qui m’a envoyé dîner avec des hermites.

Au lieu d’attendre un mois, je me ſuis rendu à Veniſe en moins de vingt-quatre heures, et je me ſuis préſenté au ſecrétaire Buſinello frère de celui qui l’étoit dix-huit ans auparavant. D’abord que je lui ai dit mon nom, il m’embraſſa, me fit aſſeoir près de lui, me dit que j’étois libre, et que ma grace étoit la récompenſe de ma confutation de l’hiſtoire du gouvernement de Veniſe d’Amelot de la Houſſaye, que j’avois publiée en trois volumes in 8υο quatre ans auparavant. Il m’a dit que j’avois mal fait à m’enfuir, puisque ſi j’euſſe encore eu un peu de patience, on m’auroit remis en liberté. Je lui ai répondu que je croyois d’être condamné à reſter là pour toute ma vie : il repartit que je ne pouvois pas m’imaginer cela, car à petite faute petite peine. Je l’ai pour lors interrompu avec quelqu’émotion, et je l’ai prié en grace de me communiquer ma faute, car je n’avois jamais pu la deviner. Le ſage circoſpetto ne me répondit alors qu’en me regardant ſérieux en mettant