Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/35

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j’ai pris ce galetas pour ma priſon ; mais je me ſuis trompé. Il empoigna une groſſe clef, il ouvrit une groſſe porte doublée de fer haute trois pieds et demi, qui dans ſon milieu avoit un trou rond de huit pouces de diamêtre, et m’ordonna d’entrer. Tandis qu’il ouvroit cette porte je regardois attentivement une machine de fer enclouée dans la forte cloiſon, qui avoit la forme d’un fer à cheval, un pouce d’épaiſſeur, et un diamêtre de cinq d’un à l’autre de ces bouts paralleles. Je penſois à ce que cela pouvoit être, lorsque le gardien me dit en ſouriant : je vois monſieur que vous voudriez deviner à quoi cette machine ſert, et je peux vous le dire. Lorsque leurs excellences ordonnent qu’on étrangle quelqu’un, on le fait aſſeoir ſur un tabouret, le dos tourné contre ce collier, et on lui place la tête de façon qu’il embraſſe la moitié de ſon cou, et une maſſe de ſoye qui lui environne l’autre moitié, paſſe avec ſes deux bouts par ce trou qui aboutit à un moulinet auquel on les recommande, et un homme le tourne jusqu’à ce que le patient ait rendu l’ame à notre Seigneur, car le confeſſeur ne le quitte, Dieu ſoit loué, que lorsqu’il eſt mort. — C’eſt fort-ingénieux, lui répondis-je, et je penſe, monſieur, que c’eſt vous-