Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/53

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remèdes pour guérir des maux, elle nous fournit du moins des moyens ſûrs d’en acquérir. On fait grand cas en Ruſſie de cette maladie là, jusqu’à faire compliment à ceux qui en ſont attaqués. Des violens friſſons me firent connoître dans le même jour que j’étois aſſailli par la fiévre : j’ai gardé le lit, et le lendemain je n’ai rien dit : mais le ſurlendemain que le gardien trouva pour la ſeconde fois mon dîner tel qu’il me l’avoit porté, me demanda comment je me portois ; et je lui ai répondu que cela alloit fort-bien : il me parla alors avec emphaſe des avantages que ſes priſonniers avoient lorsqu’ils étoient malades, que le tribunal leur fourniſſoit gratis médecin, médecines, et chirurgien, et que j’avois tort de ne pas lui donner mes ordres, puisqu’il étoit ſûr que j’étois malade. Je ne lui ai rien répondu, mais malgré cela il retourna trois heures après ſans aucun de ſes ſatellites, une bougie à la main, ſuivi d’une figure grave, et impoſante, qui me fit d’abord connoître le médecin.

J’étois dans l’ardeur de la fiévre, et c’étoit le troiſième jour qu’elle me brûloit le ſang : il me fit des interrogations, et je ne lui ai répondu autre choſe, ſi non qu’au