Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/85

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donna à l’avare Nobili de deſcendre avec lui pour parler à M. le ſecrétaire : je ſuis ſorti avec Laurent pour le laiſſer en liberté, et en moins d’un quart d’heure je l’ai vu paroître ayant au lieu de ſes boucles les miennes : il étoit naturel de lui en demander la raiſon ; mais ſous les plombs on ne fait rien que par réflexion : je n’ai rien dit, et ils deſcendirent. Il laiſſa le cachot ouvert, et ferma les autres portes. Une demi heure après je les ai revus, et Nobili pleuroit. Laurent me fit rire en m’ordonnant de lui remettre tout l’argent que cet homme m’avoit laiſſé. Nobili entra dans le cachot, et en ſortit d’abord tenant entre les mains ſes ſouliers, d’où il tira deux petits ſacs de cequins qu’il porta, précédé par Laurent, au ſecrétaire. Ils remontèrent après, et l’uſurier mit ſes ſouliers beaucoup moins peſans, et ſes boucles : il prit ſon manteau, et ſon chapeau, et s’en alla avec Laurent qui pour lors m’enferma. Le lendemain il fit emporter ſes hardes, et me dit que d’abord que le ſecrétaire reçut la ſomme il remit ce fripon en liberté : je n’ai plus entendu parler de lui. Je n’ai jamais ſu les moyens que le ſecrétaire employa pour obliger cet infame à confeſſer qu’il avoit cette ſomme avec lui :