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IV


Or, quels ont été les expulseurs ?

1° Le chef d’abord, M. Chapleau fulminant… parce qu’il est chef ; parce qu’il s’appelle lion… parce qu’il en porte la crinière et qu’il en pratique l’arithmétique.

2° Certains collègues de M. Chapleau, expulsant afin de n’être pas expulsés ;

3° Senécal, Dansereau & Cie avec leurs instruments : Provencher et Gélinas anathématisant par la voix de la Minerve.

4° Messieurs Flynn et Bouchard opérant dans le Journal de Québec ;

5° Monsieur Demers se commettant dans le Monde.

6° Monsieur Fabre, pour la dixième fois, girouettê conservateur ! Fabre ! carottant dans l’Événement avec son compère M. Levasseur.

Chapleau ! Flynn ! Paquet ! Senécal ! Dansereau ! Fabre ! Bouchard ! Demers ! Levasseur ! Provencher !

Voilà l’espèce de conseil des dix qui, deux mois durant, a fait trembler la république québecquoise ! voilà le formidable tribunal qui a décrété et exécuté l’expulsion de nos amis politiques !

Cercle d’apôtres singulièrement qualifiés vraiment ! pour faire régner chez nous l’orthodoxie en matière de politique conservatrice et expurger nos rangs de tout, ce qui n’est pas pur de tout alliage !

Ce ne sont là, naturellement, que les plus fortes têtes du conseil, les gros canons avec lesquels on a bombardé l’ostracisme. Car nous n’en finirions pas, s’il fallait mentionner tous les petits pétards, les torpilles inoffensives, les fusils sans plaque, les mitrailleuses à poudre, etc., que l’on a sur les proscrits… Et les maigres roquets acharnés à leurs talons ! et les acrobates et saltimbanques politiques qui, deux mois durant, ont dansé la carmagnole autour des ennemis de MM. Senécal, Dansereau & Cie, s’il fallait les nommer tous !…


V


Voilà donc les expulseurs.

Il semble tout d’abord qu’avant de chasser les conservateurs de chez eux, Messieurs Senécal, Flynn, Paquet, Fabre, Levasseur et Bouchard, eux du moins, eussent dû se demander ce qu’ils sont dans les rangs conservateurs… comment ils y sont venus… à quel titre ils y demeurent… pour quels motifs on les y tolère !…

M. Chapleau devrait, il nous semble, se rappeler qu’on le surprenait, il n’y a pas longtemps, à offrir l’olivier de la paix, à fumer le calumet de l’alliance avec ce qu’il y a de plus avancé dans les rangs libéraux ; que, depuis de nombreuses années, il s’applique, avec une funeste ténacité, à renier l’une après l’autre les doctrines conservatrices, à démolir peu à peu l’édifice des institutions politiques que nos chefs, ses prédécesseurs, avaient érigé avec tant de soin.