Livre & certes chaque air particulier des chevaux reflèmble à chaque
%t J^ stml meftier particulier des hommes. Seroit-ce pas chofe ridicule,
fi on difoit que quelqu'un eft bon Tailleur, & qu'un autre
vint dire, mais il ne fçait pas faire des fouliers, coi il ne
fçait pas danfer fur la corde ? Il faut faire le meftnè jugement
des airs des chevaux $ car ils font comme autant de meftiers
particuliers. Combien qu'un cheval puiflè bien aller à deux
fortes d'airs, il ira pourtant bien difficilement à trois. Ainfi un
homme peut bien être de deux ou trois meftiers, mais non pas
de tous, en forte qu'il puiflè en travailler bien. Qui plus eft,
un cheval ne fauroit être mis à aucune chofe, fi la nature ne
l'y a fait naîftre, non plus qu'un homme ne paroît qu'un lour-.
daut, & qu'un étourdi en un meftier, s'il n'y eft propre. Quel»
ques. fois ceux qui font ces folles demandes ici font poufles par
l'ignorance : & pour la plus part, cela provient d'émulation &
d'envie au Cavalier & au cheval pour l'amour du Cavalier,
qu'ils veulent mefprifer & abbaiffer ; d'autant qu'étans perfonnes
de peu de vertu, ils ne làuroient obfcurçir par leurs actions la
renommée d'un homme de mérite s'ils n'en detraâent, & par
leurs coups de langue, tâchent à jetter de la pouffiere fur lès
belles vertus. Or c'en eft affés de cette matière, qui n'eft que
trop véritable, mais de mauvais goût. . Plufieurs chevaux naturellement
bons font rencontre de mauvais Maîtres, qui font cauiè
de leur perte, & plufieurs méchans chevaux font rencontre de
bons Maîtres, qui font caufe qu'ils deviennent quelque chofe de
bon; carde tels Maîtres feront toujours quelque chofe de bon
de rien qui vaille, quoy que l'art doive toujours fuivre ja nature,
& jamais ne s'y. oppofer ; parce qu'elle eft la maîtreffe du
monde, & elle doit être obeïe. J'entens en ce qui concerne le
Manège & chofes femblables ; car je ne me mefte point des my~
Itères relevés de la Théologie, mais feulement de Ja Cavalerie.
Davantage, il y en a qui dïfent, ç'eft ici un bon cheval, ,& c'eft
là un Rofie : en quoi ils iè trompent grandement, car il n'y a
rien au monde de fembjable à ce qu'ils appellent un Rofle : c'eft
feulement l'ignorance du Cavalier qui fait les Rofîès, & non k
nature, Si donc. le Cavalier fuivoit la nature, il fauroit mieux
les approprier à ce à quoi h nature les a ctç®* fa forte qu'ils
feraient
Page:Cavendish - L’Art de dresser les chevaux, 1737.djvu/31
Cette page n’a pas encore été corrigée
16
LA METHODE NOUVELLE