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Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/112

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de Nevers monter en carrosse, persuadée qu’elle alloit seulement se promener, entendre dire à son cocher : À Rome. Mais comme avec le temps elle connut mieux monsieur son mari, et qu’elle se tenoit plus sur ses gardes, elle découvrit qu’il étoit sur le point de lui faire faire encore le même voyage, et en avertit M. le Prince, lequel, aussi fertile en inventions que magnifique lorsqu’il s’agissoit de satisfaire ses goûts[1], pensa, par la connoissance qu’il avoit du génie et du caractère de M. de Nevers, qu’il falloit employer son talent, et réveiller sa passion pour les vers. Il imagina donc de donner une fête à Monseigneur à Chantilly. Il la proposa on l’accepta. Il alla trouver M. de Nevers, et supposa avec lui un extrême embarras pour le choix du poète qui feroit les paroles du divertissement, lui demandant en grâce de lui en trouver un, et de le vouloir conduire ; sur quoi M. de Nevers s’offrit lui-même, comme M. le Prince l’avoit prévu. Enfin la fête se donna ; elle coûta plus de cent mille écus, et madame de Nevers n’alla point à Rome.

Pour terminer l’article des nièces de madame de Montespan, je parlerai succinctement de l’aînée des filles du maréchal de Vivonne son frère, la seule qui ait paru à la cour du temps de sa faveur. Elle épousa le prince d’Elbeuf par les soins et les représentations continuelles de madame de Maintenon, à qui

  1. * M. le duc, pour entrer secrètement chez madame de Nevers, dont le mari étoit si jaloux, avoit acheté deux maisons contiguës à l’hôtel de Nevers.