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Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/52

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moiselle d’Aubigné catholique, elle la maria au premier qui se présenta[1] ; et ce fut M. Scarron, trop

  1. Madame de Neuillan n’attendit pas qu’un époux se présentât, elle prit la peine de le chercher. Ce fut elle qui, fréquentant la maison de Scarron, y amena à sa suite mademoiselle d’Aubigné, et cela avec l’intention bien arrêtée d’arriver à un mariage. Les Mémoires de Languet de Gergy ne laissent aucun doute sur ce point « Je vois, écrit-il, par les Mémoires qui m’ont été donnés, que ce fut madame de Neuillan qui imagina ce beau mariage, et qu’il fut le fruit de son intrigue. Avare comme elle étoit, elle se trouvoit surchargée de l’entretien d’une fille de qualité, sa parente, et elle ne songeoit qu’à s’en défaire, sans qu’il lui en coutât. Ainsi, jugeant par la dépense que faisoit M. Scarron, qu’il avoit du bien, et sachant qu’il étoit indisposé pour ses parens avec qui il avoit été en procès, elle crut faire un coup d’état de faire épouser mademoiselle d’Aubigné par ce cul-de-jatte et de se décharger, de ce fardeau sur lui. La jeune demoiselle ne pouvoit vouloir que ce que voulait sa protectrice, sans laquelle elle seroit restée sur le pavé, et M. Scarron se trouva trop heureux qu’une personne aussi aimable voulût bien lui donner sa main. Ainsi se fit ce mariage et cette bizarre alliance de l’homme le plus contrefait de Paris avec la fille la plus aimable, et du poète le plus licencieux avec la fille de France la plus retenue et la plus modeste. Mais la nécessité a les mêmes droits que l’amour, et ce n’est pas la première fois qu’elle a uni des personnes qui ne sembloient pas avoir été créées l’une pour l’autre. » (Mémoires, p. 108, éd. Lavallée.)

    À quelle époque et en quel endroit fut célébré le mariage, voilà ce qu’il est impossible de préciser aujourd’hui. L’érudit Jal dit à ce sujet « Il ne fut pas célébré chez Scarron, qui, tout impotent qu’il était, pouvait cependant quitter sa chambre, car Loret, dans une lettre du 9 novembre 1652, parle d’un voyage fait par le ménage Scarron à travers la Tourraine afin d’aller chercher un port où il voulait s’embarquer pour l’Amérique. L’union du poète et de Françoise d’Aubigné fut bénite, certainement, dans une église de campagne ; on ne trouve, en effet, dans aucun des registres des soixante-huit paroisses de Paris, de 1650 au 9 juin 1652, aucune mention de la cérémonie nuptiale. Trois fois j’ai lu ligne à ligne ces mémoriaux des églises, et je puis assurer que l’acte à la découverte duquel j’attachais un grand prix, n’y est point inscrit. » (Dictionn. critique.)

    Voltaire indique comme date l’année 1651, mais Lavallée et