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Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/97

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L’éloignement de ce prince pour madame de Maintenon auroit paru plus naturel, s’il eût été fondé sur ce qu’il savoit bien qu’elle condamnoit le scandale donné à toute la France par la manière dont il vivoit avec une femme mariée et enlevée à son mari. Elle lâchoit même souvent, sur ce sujet, des traits dont on ne devoit pas lui savoir gré, et tels que celui-ci : Elle dit un jour au Roi, à une revue des mousquetaires : Que feriez-vous, si on vous disoit qu’un de ces jeunes gens vit publiquement avec la femme d’un autre, comme si elle étoit la sienne ? Il est vrai que j’ignore le temps où elle fit cette question, et qu’il est à présumer qu’elle se croyoit alors bien sûre de sa faveur. J’ignore aussi quelle fut la réponse du Roi ; mais le discours est certain, et il suffit pour faire voir quels ont été les sentimens et la conduite de madame de Maintenon à cet égard, d’autant plus qu’elle étoit encore, dans ce temps-là, chez madame de Montespan, auprès de ses enfans.

Cependant le Roi, si prévenu dans les commencemens contre madame de Maintenon, qu’il ne l’appeloit d’un air de dénigrement, en parlant à madame de Montespan, que votre bel esprit, s’accoutuma à elle, et comprit qu’il y avoit tant de plaisir à l’entretenir, qu’il exigea de sa maîtresse, par une délicatesse dont on ne l’eût peut-être pas cru capable, de ne lui plus parler les soirs quand il seroit sorti de sa chambre. Madame de Maintenon s’en aperçut ; et voyant qu’on ne lui répondoit qu’un oui et qu’un non assez sec : J’entends, dit-elle, ceci est un sacrifice ; et, comme