Page:Châteaubriant, Alphonse de - Monsieur des Lourdines, 1912.djvu/198

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couvrant un grand espace, se diluait dans un or pluvieux ; des noires hauteurs descendait un vent humide, qui jouait avec les dernières feuilles mortes, charriait d’âcres senteurs d’hiver, senteurs d’écorces mouillées, de pommes de pin et de glands tournant au terreau ; et aussi ce vent retroussait le poil d’hiver du Comte Caradec, découvrant, par places, la peau plus claire.

« Ah ! Ah ! Frédéric voudrait me voir rester ici ! »

Il calculait plutôt qu’après un séjour de deux mois encore auprès de son père, il aurait rempli tout son devoir et se trouverait en règle avec les convenances.

Et, de son regard perçant, il cherchait là-bas, par-dessus les coteaux, du côté de Paris. Il songeait…

Il songeait à Nelly de Giverny, une chanteuse légère dont il était l’amant depuis dix-huit mois. Jusque-là, il ne s’était adonné qu’aux amours passagères, qu’il sablait comme du champagne, aimant trop le plaisir pour se prendre à la passion qui enchaîne. Mais, dès qu’il l’avait entendue, cette Nelly, sur la scène, il s’était senti possédé,