Page:Chénier - Œuvres complètes, éd. Latouche, 1819.djvu/159

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Dans une vie enfin plus douce et plus heureuse.
La Fortune arrivant à pas inattendus
Frappe, et jette en vos mains mille dons imprévus :
On le dit. Sur mon seuil jamais cette volage
N’a mis le pied. Mais quoi ! son opulent passage,
Moi qui l’attends plongé dans un profond sommeil,
Viendra, sans que j’y pense, enrichir mon réveil.

Toi, qu’aidé de l’aimant plus sûr que les étoiles,
Le nocher sur la mer poursuit à pleines voiles,
Qui sais de ton palais, d’esclaves abondant,
De diamant, d’azur, d’émeraudes ardent,
Aux gouffres du Potose, aux antres de Golconde,
Tenir les rênes d’or qui gouvernent le monde,
Brillante déité ! tes riches favoris
Te fatiguent sans cesse et de vœux et de cris :
Peu satisfait le pauvre. Ô belle souveraine !
Peu ; seulement assez pour que libre de chaîne,
Sur les bords où malgré ses rides, ses revers,
Belle encor l’Italie attire l’univers,
Je puisse au sein des arts vivre et mourir tranquille !
C’est là que mes désirs m’ont promis un asile ;
C’est là qu’un plus beau ciel, peut-être dans mes flancs,
Éteindra les douleurs et les sables brûlans.
Là, j’irai t’oublier, rire de ton absence ;
Là, clins un air plus pur respirer en silence,
(Et nonchalant du terme où finiront mes jours)
La santé, le repos, les arts et les amours.