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Page:Chénier - Œuvres complètes, éd. Latouche, 1819.djvu/259

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De la Grèce oubliée enfant plus généreux,
Sur ses rives jadis si noblement fécondes,
Du Permesse égaré je ramène les ondes.
Pour la première fois de sa honte étonné,
Le farouche turban, jaloux et consterné,
D’un sérail oppresseur, noir séjour des alarmes,
Entendra nos accens et l’amour et vos charmes.
C’est là, non loin des flots dont l’amère rigueur
Osa ravir Sestos au nocturne nageur ;
Qu’en des jardins chéris des eaux et du zéphire,
Pour vous, rayonnant d’or, de jaspe, de porphire,
Un temple par mes mains doit s’élever un jour.
Sous vos lois j’y rassemble une superbe cour
Où de toits les climats brillent toutes les belles :
Elles règnent sur tout, et vous régnez sur elles.
Là des filles d’Indus l’essaim noble et pompeux,
Les vierges de Tamise, au cœur tendre, aux yeux bleus,
De Tibre et d’Éridan les flatteuses sirènes,
Et du blond Eurotas les touchantes Hélènes,
Et celles de Colchos, jeune et riche trésor,
Plus beau que la toison étincelante d’or,
Et celles qui du Rhin l’ornement et la gloire
Vont dans ces froids torrens baigner leurs pieds d’ivoire,
Toutes enfin ; ce bard sera tout l’univers.