Page:Chénier - Œuvres en prose éd. Moland, 1879.djvu/118

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sur les extravagantes fureurs de ces hommes-là. Ils redoutent, ils haÏssent mortellement tous ces citoyens probes et sages qui, par un patriotisme mêlé de cette fermeté inflexible dans les choses et de cette modération dans les moyens qui composent la vraie équité, veulent élever la France à une prospérité inébranlable. Ils ont raison. de haÏr et de craindre ces derniers’, car ce sont leurs vrais ennemis, et par conséquent nos vrais amis ; mais pour les autres, ils ont tout à en attendre : ce sont donc leurs vrais amis, leurs amis réels, et par conséquent nos vrais ennemis : et, quelle que soit la différence de langage de ces deux partis, puisqu’ils tendent au même but, puisque le succès de l’un amènerait infailliblement ce que l’autre désire, il est 4 palpable qu’ils ne doivent être à nos yeux qu’un seul et même parti.

Ainsi, nous connaîtrons qui nous devons écouter, qui nous devons craindre ; ainsi, nous saurons à quels hommes nous devons les maux passés et présents : et nous les punirons, non point par ces soulèvements tumultueux et cruels, par ces persécutions acharnées, qui montreraient que nous ne serions pas encore tout-à-fait sortis de leur école, mais par un repentir notoire de toutes lès violences, de toutes les imprudences qu’ils nous ont déjà fait commettre, par un désir efficace de les réparer ; et pour eux, par une défiance éternelle et un intarissable mépris. Nous avons été conduits à ces conclusions par un enchaînement simple de principes et de conséquences. Si j’en ai interverti l’ordre naturel, si j’y ai mêlé de faux raisonnements et des sophismes, que sans emportement,