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Page:Chénier - Œuvres en prose éd. Moland, 1879.djvu/89

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nous jettent dans ces combats de nuit où l’on frappe amis et ennemis. Essayons donc si, en écoutant tout ce qui se dit, nous pourrons entrevoir quelque lueur qui nous conduise. Tous ceux qui ont quelque sagesse, et qui veulent motiver les alarmes qu’ils nous donnent, et non se borner à des déclamations sans suite et sans liaison, se réduisent à peu près à ceci. Ils calculent le ressentiment des princes étrangers que notre révolution a pu blesser, et l’intérêt et les craintes de tous les rois dont les sujets peuvent être trop frappés de l’exemple des Français, et l’ambition et l’avidité des nations qui, malgré les principes d’humanité, de justice et de droit des gens universellement professés aujourd’hui, ne laissent pas de continuer :a épier toute occasion de s’enrichir et de s’agrandir aux dépens de celles qui paraissent être peu en état de se défendre. Ainsi, ils dirigent nos inquiétudes, tantôt vers les Autrichiens, qui cependant, fatigués et épuisés par une longue guerre sanglante et coûteuse, et alarmés eux-mêmes des insurrections ou commencées ou instantes dans plusieurs de leurs provinces, ne paraissent guère pouvoir songer à nous insulter ; tantôt vers les Anglais, et cette nation, dont on parle tant à Paris, quoiqu’on l’y connaisse si mal, est en effet plus redoutable ; tantôt contre d’autres puissances qui toutes sont en effet plus ou moins à craindre ; mais presque tous se réunissent à penser que ces puissances sont excitées et encouragées par les fugitifs français, et par les relations qu’ils ont conservées en France. Il est pourtant bien peu vraisemblable que les cabinets de l’Europe