Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces camps, ces étrangers, ces bataillons français
Traînés à conspirer au trépas de la France ?
De quoi rit ce troupeau d’eunuques du palais ?
Riez, lâche et perfide engeance !


XI



D’un roi facile et bon corrupteurs détrônés,
Riez ; mais le torrent s’amasse.
Riez ; mais du volcan les feux emprisonnés
Bouillonnent. Des lions si long-temps déchaînés
Vous n’attendiez plus tant d’audace !
Le peuple est réveillé. Le peuple est souverain.
Tout est vaincu. La tyrannie en vain,
Monstre aux bouches de bronze, arme pour cette guerre
Ses cent yeux, ses vingt mille bras,
Ses flancs gros de salpêtre, où mugit le tonnerre :
Sous son pied faible elle sent fuir sa terre,
Et meurt sous les pesants éclats
Des créneaux fulminants ; des tours et des murailles
Qui ceignaient son front détesté.
Déraciné dans ses entrailles,
L’enfer de la Bastille à tous les vents jeté,
Vole, débris infâme, et cendre inanimée ;
Et de ces grands tombeaux, la belle Liberté,
Altière, étincelante, armée,


XII



Sort. Comme un triple, foudre éclate au haut des cieux
Trois couleurs dans sa main agile
Flottent en long drapeau. Son cri victorieux