Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/125

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vous êtes dupes de scélérats !… Suzanne est innocente !… — Suzanne est innocente ! cria le peuple avec transport. Vive le jeune prophète qui venge la vertu opprimée !… » Ils s’assemblent… « Enfant prophète de Dieu, dit le peuple, interroge-les toi-même… » Il se lève… « Qu’on les sépare… Eh bien ! toi… race méchante et maudite, dis-nous sous quel arbre ?… — Sous un chêne… — Sous un chêne ! Va ! fuis ! ton mensonge exécrable demeure suspendu sur ta tête coupable. Voilà comment vous jugiez le peuple ! Qu’on fasse entrer l’autre. — Eh bien ! scélérat ! dis-nous sous quel arbre !… — Jeune enfant, quel es-tu ? que veux-tu ? quel droit as-tu d’interroger les vieillards ?… — Parle, parle, imposteur. Ce n’est point moi qui t’interroge ; c’est tout le peuple ; c’est Dieu qui tient le glaive tout prêt… Tremble, ton heure vient. Réponds, dis sous quel ombrage !… — Réponds, s’écrie le peuple… » Il se déconcerte un instant ; mais il se relève, essaye au calme son front dur et pervers. Il rassure sa voix, il commence, il s’arrête : « Un sycomore épais… — Vengeance sur ta tête, vil imposteur ! voilà comment vous jugiez le peuple !… La beauté vous séduisait !… »

On les lapide, et le peuple en triomphe ramène à Joachim son épouse, qui, donnant la main à sa jeune sœur, l’aborde avec un sourire.


INDICATIONS DE L’AUTEUR


ÉCRITES


À LA SUITE DU POEME DE SUZANNE[1]


Cela aura six chants, dont j’ai marqué les séparations. J’ai regret de ne pouvoir le faire plus court. Il faudra l’orner de comparaisons, de détails asiatiques sur les vêtements, les aromates, les richesses, etc., pour en faire un ouvrage piquant.

  1. Édition 1833.