Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/133

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Henri V................
Grand roi, vaillant guerrier, d’un père usurpateur.
Dès son adolescence illustre imitateur.
N’étant que prince encore, aux périls, au carnage
De nocturnes bandits formèrent son courage.
Voilà quels chevaliers, l’effroi des grands chemins,
Confièrent l’épée à ses royales mains.
À leur tête longtemps il fit payer sa gloire
Au passant chargé d’or qui durant l’ombre noire
De Windsor à la hâte osait tenter les bois.
Roi, maintenant, il vient par les mêmes exploits
Signaler contre nous son noble apprentissage
Du métier de brigand si cher à son jeune âge.
Les Anglais à ses goûts toujours accoutumés,
Gens de sang, de débauche et de proie affamés,
Aimaient à voir chez nous le maître de leur trône.
Le pistolet en main, demander la couronne ;
Et chérissaient un prince incapable d’effroi.
D’un antre de voleurs sorti pour être roi.

Vincennes ! bois auguste où le grand saint Louis
Nous rendait la justice au pied d’un chêne assis,
Pensais-tu que jamais de ce roi plein de gloire,
La moitié de la France outrageant la mémoire,
Sous tes antiques murs qui furent son palais.
Vînt couronner un front qui n’était point français ?
Saint-Denis ! lieu sacré ! tes voûtes sépulcrales
Tressaillirent. L’on vit fuir les ombres royales.
Tremblantes qu’à leur cendre un étranger nouveau
Mêlant sa cendre impie usurpât leur tombeau.
Guillaume, heureux vassal des rois de cette terre,