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Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/199

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Et n’y point avec toi confondre tes écrits ;
Et ne point mesurer par toi, par ta faiblesse.
De tes productions la force et la noblesse.
Peu savent en deux parts diviser l’écrivain :
Grand et sublime auteur, homme petit et vain.


CHANT TROISIÈME


LA RÉPUBLIQUE DES LETTRES


Reperies qui, ob similitudinem morum, aliena malefacta sibi objectari putent. — Tacit., Annal., lib. IV, cap. 33. — Si irascare, adgnita videntur, ibid., 35.


Il n’est que d’être roi pour être heureux au monde.
Bénis soient tes décrets, ô sagesse profonde !
Qui me voulus heureux, et, prodigue envers moi,
M’as fait dans mon asile et mon maître et mon roi.
Mon Louvre est sous le toit, sur ma tête il s’abaisse.
De ses premiers regards l’orient le caresse.
Lit, sièges, table y sont portant de toutes parts
Livres, dessins, crayons, confusément épars.
Là, je dors, chante, lis, pleure, étudie et pense.
Là, dans un calme pur, je médite en silence
Ce qu’un jour je veux être ; et, seul à m’applaudir,
Je sème la moisson que je veux recueillir.
Là, je reviens toujours, et toujours les mains pleines,
Amasser le butin de mes courses lointaines ;
Soit qu’en un livre antique à loisir engagé,
Dans ses doctes feuillets j’aie au loin voyagé ;