Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/243

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SATIRES




I[1]


Il est bon de tout feindre et même la pudeur.
Mais qui peut sans dégoût, sans subite froideur,
Voir une beauté mûre et presque sous les rides
Affecter d’un enfant les alarmes timides ?
Tout mensonge a besoin d’un air de vérité ;
Et j’aime mieux cent fois l’indiscrète gaîté,
Trop folle, trop hardie, et qui n’est pas sans grâce,
Que d’une antique Agnès la risible grimace.


II[2]


....................
Alors pour son argent il a danse, musique,
Goût, talents, grâce, esprit, fauteuil académique ;
Grand cercle de beautés qui viennent chaque nuit
Le bercer, l’endormir, veiller près de son lit ;
Maîtresse au nez fripon qui l’aime et le ruine ;
Rimeurs, toujours amis de ceux chez qui l’on dîne ;
Tous pirates rusés qui s’entendent fort bien ;
Vrais barbiers de Midas, qui du bon Phrygien
Par eux loué, flatté, mis au rang des merveilles,
Sous un bandeau royal déguisent les oreilles.

  1. Édition de G. de Chénier.
  2. Édition de G. de Chénier