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ODES


IX[1]

Mais la haineuse ingratitude
À taire les bienfaits seule met son étude.
La reconnaissance aux doux yeux,
Au souris caressant, à la longue mémoire,
Parle, et des dieux chérie, est l’amour et la gloire
Des mortels semblables aux dieux.

Quel fugitif, d’un pied colère.
Va renverser l’autel qui lui fut tutélaire ?
Quel nageur sauvé du trépas
Brûle son bienfaiteur, le roseau du rivage ?
Quel rossignol ne chante, à couvert de l’orage,
L’ormeau qui lui tendit les bras ?

Ainsi pour ces molles prairies
Que Versaille, au retour des Pléiades fleuries[2],
Étendit sous mes pas errants ;
Pour ces zéphyrs, l’ombre fraîche et secrète,
Dont il a du lion, sur ma douce retraite,
Tempéré les feux dévorants ;

  1. Édition de G. de Chénier.

  2. Le manuscrit porte :
    Que V… au retour des Pléiades fleuries.

    L’auteur a écrit en marge de cette strophe :

    Des Pl. Aratus v. 263. — Ce qui veut dire : des Pléiades, voyez Aratus, v. 263. Puis il cite ainsi les vers du poète grec :

    αἱ μὲν ὁμῶς ὀλίγαι καὶ ἀφεγγέες, ἀλλ’ ὀνομασταὶ

    ἦρι (leur lever) καὶ ἑσπέριαι, ζεὺς δ’ αἴτιος, εἱλίσσονται.