Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/284

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       Te transporte au banquet des dieux,
       Lorsque ta haine vengeresse,
Rallumée à l’aspect et du meurtre et du sang,
Ouvre de ton carquois l’inépuisable flanc.
De là vole aux méchants ta flèche redoutée,
       D’un fiel vertueux humectée,
Qu’au défaut de la foudre, esclave du plus fort,
       Sur tous ces pontifes du crime,
Par qui la France, aveugle et stupide victime,
Palpite et se débat contre une longue mort,
       Lance ta fureur magnanime.


ANTISTROPHE PREMIÈRE


       Tu crois, d’un éternel flambeau
Éclairant les forfaits d’une horde ennemie,
       Défendre à la nuit du tombeau
       D’ensevelir leur infamie.
Déjà tu penses voir, des bouts de l’univers,
Sur la foi de ma lyre, au nom de ces pervers,
Frémir l’horreur publique ; et d’honneur et de gloire
       Fleurir ma tombe et ta mémoire ;
Comme autrefois tes Grecs accouraient à des jeux,
       Quand l’amoureux fleuve d’Élide
Eut de traîtres punis vu triompher Alcide ;
Ou quand l’arc Pythien d’un reptile fougueux
       Eut purgé les champs de Phocide.