Page:Chair molle.djvu/132

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étendait les mains, les frappait l’une à l’autre avec un rythmique dandinement des hanches.

Quand elle acheva le troisième couplet, des bravos enthousiastes éclatèrent. Les soldats surtout s’évertuaient à bruire, ils se levaient et applaudissaient avec de larges ricanements.

Dosia, légère, descendit de la scène. Devant le nez de chaque auditeur elle passa le plateau, ponctuant ses demandes en secouant les sous.

— Eh, vous, gros, vous m’oubliez.

— Oh ! ma fille, je suis en dêche.

— Oh ! là ! là ! pauvre homme, je vous plains. Et vous, c’est-il votre femme qui vous force à faire des économies ?

Lucie examinait et écoutait très attentive. Après tout, ils n’étaient pas bien difficiles, ces gens-là. Dosia était une brave fille, et très drôle ; mais enfin, elle avait bien mal chanté. Cependant, une crainte vague encore lui demeurait.

À son tour, la femme du cornac se leva. Elle fit une révérence sérieuse, elle roucoula, en lançant de tendres œillades à la draperie rouge de l’Alcazar :

Gentil voisin,
Par le même chemin,
À travers les roses nouve… éel… éelles
Sans crainte de les écraser,
Pour que ma réponse ait des ai… ailes
Je la remets dans un baiser.