Page:Chair molle.djvu/61

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gnes. Aux femmes toujours enfermées, ce soleil parut magnifique ; éblouies, elles furent obligées à regarder du côté de l’ombre.

Trois cochons éventrés à la porte d’une charcuterie excitèrent l’apitoiement de Lucie Thirache. Elle s’emporta contre Emilia qui s’intéressait à voir le sang filer sur la graisse blanche, finir par goutter en des terrines posées sur le trottoir. Elle s’indigna, répliqua aux plaisanteries par un argument qui amena le silence :

— Qu’est-ce que vous diriez, si on vous en ferait autant ?

La chaussée s’allongeait, irrégulière, entre des bâtiments rentrants et sortants, des pâtés de constructions où des ruelles sordides étaient percées. Madame en indiqua une très noire, très sale.

— C’est là que demeure Blanche…, la dernière maison près du rempart.

— Ça pue-t-il !

— Comment des femmes peuvent-elles vouloir travailler là dedans ?

La Donard raconta des horreurs : les artilleurs s’y battaient à coups de sabre et rossaient les femmes.

À la porte de Paris, un lignard en blouse de treillis était vautré sur un banc. Il se redressa subitement, clama :

— Tiens, les pucelles en sapin !