Page:Chalandon - Essai sur la vie et les œuvres de P. de Ronsard, 1875.djvu/209

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— 197 — donner un corps à l'immatériel, ou bien, au con- traire, idéaliser le réel, donner une âme à la malière, une pensée à l'être inanimé. Le lecteur troublé, déconcerté par ce procédé bizarre, ne sait plus où il en est; il se demande s'il est en présence de l'image ou de la réalité, il les confond l'une et l'autre. C'est que, dans le fait, l'image et la pensée ne font cprun. Le poêle pense en images; il a si bien fondu nisemble l'image et la pensée, que l'une est .inséparable de l'autre. Son procéda est, en somme, d'un usage assez simple; il consiste à donner au monde sensible des épitbèlesqui s'appli- quent au monde moral ; ou bien, au monde moral, des épilhètes sensibles. Assez souvent ces images font rêver le lecteur, lui ouvrent de vastes horizons; mais, souvent aussi, il cherche, sans le trouver, ce que lepoëteveut dire. Ainsi, quand Hugo appelle la musique une lune de l'art^ il est fort diflicile de déterminer le sens qu'il donne à ce mot, et je crois que si on lui demandait d'expliquer nettement ce qu'il entend en disant que la iwwl est blcue^ il pour- rait être embarrassé lui-même. Son slyle est lelati- vement plus clair, quand il nous montre ses vers sous des formes humaines et qu'il leur prête la vie :

Tout l'invisible essaim tic ces dénions joyeux

A (lu lire aux éelats, (|nanil là, devanl mes yeux,