Page:Chalandon - Essai sur la vie et les œuvres de P. de Ronsard, 1875.djvu/245

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— 253 — Nous avons parlé précédemment de la poésie pastorale de Ronsard, nous n'y reviendrons pas : disons seulement qu'on y trouve assez fréquemment des vers empreints d'un sentiment vif et délical; des vers, enfin, dans le genre de ceux-ci :

Or sus, asseyez-vous icy ; l'herbe est fleurie ; Icy la vigne tendre aux ormeaux se marie ; Icy l'ombrage est frais ; icy naissent les fleurs ; Icy le rossignol rechante ses douleurs ; Icy l'onde murmure, et le gentil zéphyre Au travers de ce bois par les feuilles soupire...

Ronsard a étudié«la nature; il l'a aimée; il l'a peinte dans ses vers ; mais il n'a pas su toujours suffisamment donner la vie à ses tableaux. Comme le sculpteur qui est capable de représenter l'image de l'homme dans toute sa perfection, mais qui ne peut l'animer, Ronsard n'a pas fait vivre la nature dans ses vers. Ajoutons que, peut-être, s'il l'avait pu, il ne l'eût pas voulu; le panthéisme aurait répugné à son génie chrétien.

En résumé , il est donc , avec Belleau , le gentil peintre de la nature, celui qui, au sei- zième siècle, aima le mieux la vie des champs; c'est le poëte le plus rêveur de cette époque pas- sionnée et tumultueuse. Nul ne peut évoquer son