Page:Challamel - Souvenirs d’un hugolâtre.djvu/273

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Disons, en passant, que le bal Mabille fut une des curiosités du temps, une Grande-Chaumière de la rive droite, où les étrangers venaient faire connaissance avec des illustrations chorégraphiques d’un genre ultra-léger, parmi lesquelles nous citerons Chicard, Pomaré, Mogador, Rose Pompon et Rigolboche.

Les jeunes gens du commerce, des deux sexes, s’y donnaient rendez-vous, et dansaient en posant pour la galerie, aux risques de se voir appréhender au corps par les gardes municipaux. Charmant, coquet endroit, d’ailleurs fréquenté par nombre d’individus qui, plus tard, n’avouaient pas volontiers leurs prouesses devant l’excellent orchestre de Mabille. Paradis pour le monde interlope, paradis aujourd’hui fermé, détruit, n’existant plus que dans les souvenirs.

Mais, lorsque Augustin Thierry nous convia chez Mabille, nous étions, pour ainsi dire, en famille, et l’on n’était admis que sur invitation personnelle.

Autour du jeune pianiste se trouvaient quelques virtuoses, violonistes et violoncellistes ; et une foule d’amateurs se pressaient dans l’enceinte où ces artistes se faisaient entendre.

Déjà un ou deux morceaux de musique avaient été exécutés, aux applaudissements de l’auditoire, lorsque tout à coup l’on vit les têtes se