Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/103

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différence qu’il y a entre l’art vrai et l’art faux. Et puis, il s’agissait d’ouvrir, à Munich, une école allemande de musique, d’après des principes tout nouveaux, une école destinée à préparer aux tâches nouvelles les artistes allemands, les chanteurs comme les instrumentistes, en leur donnant une éducation technique plus large et plus solide, et une culture intellectuelle plus riche et par là plus féconde ; il s’agissait enfin d’ériger un Festspielhaus, une scène, où non-seulement on éviterait les vices manifestes de nos théâtres modernes, qui semblent n’être conçus ni pour voir, ni pour entendre, mais où encore, et en général, on chercherait à donner, au problème du théâtre en lui-même une solution qui répondît à ces conditions nouvelles. Avec une indomptable énergie, Wagner se mit à l’œuvre. Ici, comme toujours, les journaux partirent en guerre contre le maître, faisant assaut de violence et de vulgarité, se répandant en haineuses moqueries sur « l’effréné sybaritisme de ses exigences personnelles ». La Gazette d’Augsbourg affirmait « qu’un grand seigneur oriental s’accommoderait fort bien d’un train de maison comme celui de Wagner. » En tout cas, le spectacle de son activité d’alors eût bien étonné ledit grand seigneur ! Ce que Wagner a fait dans ce court laps de temps est tout simplement fabuleux. Des plans si vastes dont nous venons de parler, une partie était déjà exécutée, et tout le reste en voie d’exécution, lorsque Wagner dut battre en retraite devant la meute de ses ennemis, et, conformément au désir exprimé par le roi, quitter subitement Munich après ces quelques mois de séjour. Après d’admirables et suggestifs essais tentés avec le Vaisseau Fantôme et Tannhäuser, avait eu lieu, le 10 juin 1865, la représentation à jamais mémorable de Tristan et Iseult, le premier des Festspiele ; le