Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/202

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inutile, superflu, sans valeur… et le quelque chose apparaît, tel que l’avenir dévoilé le gardait en réserve ». Précisément alors, à la fin de 1849, il écrivait à Uhlig : « Il suffit maintenant de détruire, on ne saurait encore reconstruire qu’arbitrairement ». Bientôt il reconnaît que le mal a de bien plus profondes racines, et, déjà en 1850 le mot de « déviation » se trouve sous sa plume : « Où que nous regardions dans le monde civilisé, nous constatons la déviation de l’homme. »

Trois mois après, Wagner, dans son œuvre capitale : Opéra et Drame, parle de « l’effrayante déformation morale, de notre condition sociale actuelle » et s’exprime, vers la fin, comme suit : « Voulons-nous traiter avec ce monde-là ? Non, car même les traités les plus humiliants nous excluraient nous-mêmes..... Nous ne reconquerrons la foi et le courage qu’en écoutant murmurer, dans les battements du cœur de l’histoire, cette éternelle source de vie qui, cachée sous les décombres de la civilisation historique, continue à couler dans sa fraîcheur originelle ». Dans sa Communication à mes amis il déclare « mépriser profondément ce monde dont l’hypocrisie feint le souci de l’art et de la culture, tandis que, dans ses veines, on ne trouverait pas une seule goutte de sang artistique, tandis qu’il ne saurait produire un seul souffle d’excellence ou de beauté vraiment humaines ». Tous ces passages sont empruntés aux écrits de Zurich. Dans ceux de la fin de sa vie, le maître, devenu vieux, ne juge pas notre civilisation avec plus d’indulgence. Il la dit « sans cœur et mauvaise, » ne « visant qu’à la mise en valeur correcte des calculs de son égoïsme », profondément immorale, « monde du meurtre et du brigandage organisés et légalisés par la fausseté ; le mensonge et l’hypocrisie », qui « changent les hommes en monstres >» etc., etc. Tout