Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/205

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asservis par un honteux vasselage » ; mais derrière ce produit, « le plus rigide, le moins capable de vie de la nature entière», il voyait le principe même de la propriété. Dans son écrit Die Wibelungen, de la même année 1848, il exprime l’opinion que la propriété devenue héréditaire est la principale cause de la déchéance de l’humanité. « Dans l’organisation historique du régime féodal, tant qu’il subsista dans sa pureté primitive, nous trouvons exprimé ce principe, à la fois humain et héroïque : la concession d’une jouissance était donnée à celui-là seul qui, par quelque acte, par quelque service, pouvait personnellement y prétendre. Du moment où le fief devint héréditaire, l’homme, son activité individuelle, ses mérites personnels, perdirent leur valeur, qui passa à la possession seule : devenue héréditaire, ce fut elle, et non plus la vertu personnelle, qui créa l’importance sociale de l’héritage ; ainsi, la dépréciation graduelle et grandissante de l’homme, alors que montait incessamment la valeur de la possession, en vint à s’incorporer dans les institutions les plus anti-humaines… Ce fut la propriété qui légitima l’homme, cet homme qui, jusque-là, avait, seul, justifié la propriété ». Toute sa vie, le maître demeura fidèle à cette conviction. Dans l’Œuvre d’art de l’Avenir, il voit, précisément, dans ce « premier souci de l’État moderne,… de fixer à jamais la propriété, ce qui arrête la vivante fécondité de l’avenir ». Dans Opéra et Drame il dit : « De la possession, devenue propriété, sur laquelle on veut exclusivement faire reposer tout ordre quelconque, sont sortis tous les crimes du mythe et de l’histoire». Dans un de ses derniers écrits : Connais-toi toi-même (1881), il revient encore à ce thème : « Il semble bien » dit il, « qu’avec cette notion de la propriété, qui paraît si