Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Breitkopf & Härtel), ces lettres sont une des sources les plus précieuses à consulter pour l’étude du sujet qui nous occupe.

Ce qu’on désigne sous le nom de « littérature wagnérienne », d’une étendue déjà formidable, brille plus, il faut l’avouer, par sa masse que par sa valeur. Mais dans cet océan de verbeuse médiocrité, il y a au moins un petit volume qui fait exception et qui restera classique, c’est le Richard Wagner à Bayreuth, de Nietzsche. L’intense concentration de la pensée, la sûreté de discernement avec laquelle est mis en relief tout ce qui est vraiment essentiel, le noble enthousiasme qui le pénètre, la beauté sculpturale du style, font de cet opuscule un chef-d’œuvre, ce que son auteur a jamais écrit de meilleur. Nous ne saurions, certes, nous laisser ébranler, dans la foi que ce livre respire et commande, par les pamphlets absurdes, d’une trivialité révoltante, qu’écrivit plus tard cette même plume contre l’homme qu’elle avait annoncé au monde de si magistrale façon. Nous savons trop bien que J’ombre néfaste de la folie obscurcit de bonne heure le merveilleux cerveau de Frédéric Nietzsche. Et cependant l’image jadis si chère subsistait intacte au fond, tout au fond de ces lamentables ténèbres. Peu de temps avant l’effondrement final, Nietzsche, se trouvant à Lucerne, se fit conduire à Triebschen, où il avait