le drame comme un simple élément, à côté d’autres. Il faut lui rendre son ancienne dignité, et reconnaître en elle non la collaboratrice, ni la rivale, mais la mère du drame. C’est en avant et non pas à l’arrière du drame qu’est sa place. Elle chante et ce qu’elle chante, elle nous le montre là-bas sur la scène. Elle est comme une aïeule qui révélerait à ses enfants, sous la forme de légendes, les mystères de la religion. »
Mais pour que la musique remplisse ce rôle, il faut qu’à son tour elle soit incorporée dans le drame. « Une musique qui voudrait être son objet à elle-même, exprimer à elle seule un objet défini, cesserait absolument d’être de la musique. Tout effort pour devenir d’elle-même dramatique et caractéristique ne peut avoir d’autre effet que de déposséder la musique de son essence propre. » Et non seulement la musique ne saurait être à elle seule le drame, mais elle est même hors d’état de créer aucune forme pour l’œil ou pour l’imagination. « Quand le musicien essaie de peindre », dit Wagner, « il produit quelque chose qui n’est ni une peinture ni de la musique. » Personne n’a plus sévèrement jugé non plus la musique à programme : « Le programme, dit-il, aggrave encore la question du pourquoi, au lieu de la résoudre. Ce n’est pas lui qui peut exprimer la signification d’une symphonie, mais bien une action dramatique réalisée sur la scène. » Et l’on sait d’autre part que, dans les œuvres de Beethoven, Wagner a toujours vu des drames ; il affirmait que ces œuvres sublimes ne sauraient être comprises si on les considérait comme de la musique pure. Mais d’autre part il n’a point cessé de soutenir que, si heureuse et bienfaisante, si « nécessaire », qu’ait été l’erreur de Beethoven, ce maître admirable s’était trompé, en exprimant par la seule musique ce dont l’expression