Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/295

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mes amis. On croit y surprendre, chez Wagner, l’aveu qu’il n’aurait, auparavant, point été poète, mais musicien seulement ; tandis qu’évidemment le mot « poète », doit se prendre ici, dans son sens restreint, par opposition à celui de « librettiste ». En ce qui concerne le texte, Wagner élève, désormais, les prétentions d’un poète ; le texte qui, jusque-là, avait été sacrifié aux exigences de l’opéra et au souci de l’expression musicale, et limité par l’un et les autres, arrive au premier plan. Qu’il ne s’agisse point d’un changement en principe, une chose le prouve assez : c’est que Wagner, après l’achèvement du Vaisseau Fantôme écrivit le plan d’un opéra historique dans le style de Rienzi : La Sarrasine ! Il ne faut donc point concevoir l’incident comme une sorte de métamorphose magique, faisant du « musicien » un « poète » ; bien au contraire, c’est précisément ici que se montre surtout la maîtrise du musicien, parvenu à l’absolue possession de ses moyens. Ce fut l’achèvement du drame musical de Rienzi, cette manifestation grandiose de la force du compositeur, qui amena le poète à se dégager, librement et pleinement, avec et dans le Vaisseau Fantôme. C’est ce que le maître analyse clairement dans un autre passage de sa Communication, où, revenant sur le Hollandais Volant, il dit : « Désormais, dans tous mes ouvrages dramatiques, je fus d’abord poète, pour ne redevenir musicien qu’après le parachèvement du poème. Seulement, j’étais un poète bien certain d’avance de la puissance d’expression de la musique ; j’avais si bien exercé cette faculté que j’étais sûr de mon pouvoir de l’employer à la réalisation de l’intention poétique, et que non seulement je pouvais compter à l’avance sur son secours en jetant les bases de mon dessin poétique, mais que ce dessin