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Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/340

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Wotan le lui arrache, Alberich maudit l’anneau « qui perdra tous ceux qui le posséderont ». Dès lors tout le drame évolue autour de la possession de cet anneau, symbole de la puissance du monde. Siegfried naît des tragiques amours des enfants de Wotan, Siegmund et Sieglinde ; Siegfried tue le dragon et devient ainsi maître de l’anneau, mais sans en soupçonner la valeur ; il réveille la belle Brünnhilde, la Valkyrie, qui, par pitié, et contrairement aux ordres de Wotan, avait protégé son propre frère Siegmund, et l’épouse. Il part alors à la recherche d’aventures et arrive à la cour des Gibichungen, sur le Rhin ; c’est là qu’il rencontre Hagen, fils d’Alberich et demi frère de Gunther, qui depuis longtemps le guette, lui et l’anneau. Siegfried boit le breuvage d’oubli et obtient pour Gunther la main de Brünnhilde, sa propre femme ; Brünnhilde jure vengeance, révèle à Hagen où et comment Siegfried est vulnérable, et Hagen le tue à la chasse[1]. Brünnhilde, en qui renaît la « science divine, » monte sur le bûcher de Siegfried et rejette aux filles du Rhin l’anneau que le feu a désormais purifié.

Donc, ce qui forme le fond grandiose de ce drame, c’est la lutte universelle pour la puissance et la domination du monde ; pour que cette lutte embrasse le monde, elle est figurée en formes symboliques : les nains dérobent l’or aux ondines, les dieux, servis par une plus haute intelligence, s’en emparent par ruse,

  1. Le premier manuscrit des dernières paroles de Siegfried, avec des indications scéniques pour le cortège funèbre, contient, en marge, un projet de marche funèbre. Ce manuscrit est daté, au commencement, du 12 novembre 1848, à la fin, du 28 novembre de la même année. Comme il ne contient que cette seule esquisse musicale, c’est là incontestablement le premier projet de composition pour toute la grande œuvre des Nibelungen.