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Page:Chambon - Notes sur Prosper Mérimée, 1902.djvu/155

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VOYAGE EN CORSE Î2<)

« Olmeto, 12 juin 1858,

« Très digne sénateur,

« Vous ne sauriez comprendre avec quelle répugnance je viens encore interrompre vos précieuses occupations, s'agissant surtout de vous entretenir d'une affaire, dont j'ai eu déjà l'honneur de vous écrire il y a environ trois ans; mais la position de mon gendre fera, je l'espère, mon excuse auprès de vous.

« Inutile de vous donner connaissance des mœurs de nos malheureux villages, vous n'en savez que trop. Il vous reste seulement à savoir qu'il a échappé deux fois à la mort par miracle, par deux individus qui ont juré sa perte. Dans ce but, très illustre sénateur, je viens instamment vous supplier de vouloir bien exaucer les prières d'une vieille que vous avez daigné écouter autre- fois. Je n'entends pas qu'il puisse faire fortune. Nous ne voulons que l'éloigner du pays pour ces 2 ou 3 ans pour éviter le danger. Je crois qu'il sera dans le cas de gagner sa vie ou comme secrétaire ou comme employé public ou privé, à votre choix. Osant vous dire à l'avance que sa conduite sera digne de votre recommandation et vous pouvez compter sur le plus dévoué serviteur en toute circonstance.

« Tous mes parents m'ont forcé à vous écrire ces quelques lignes, espérant qu'une belle âme comme la vôtre ne nous fera pas défaut dans une si malencontreuse circonstance.

« Et dans cette douce attente, j'ai l'honneur de vous

Ciiambox. — P. Mérimée. 9